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Juste pour un bus

Ce matin, après ma petite insomnie de cette nuit, je me réveillais sous les coups de 8h30.
La première chose que je me suis dite, fut : " oh, my god".
J'avais prévu de prendre un bus pour Moalboal à environ 4h de trajet depuis Cebu city.
J'ai compris qu'il ne fallait pas que je traîne.
Je me douchais rapidement, bouclais mon sac à dos, passais par la case réception de l'hôtel afin de rendre la clé et de récupérer mon deposit de 500 pesos PHP, soit un peu moins de 10 euros.
Puis, je me précipitais dehors. Je n'avais aucune idée de l'heure de départ des bus quotidiens pour cette destination. J'avais trouvé comme info sur internet, un site, non à jour, qui précisait 4 bus par jour, premier départ 6h, dernier départ 14h à une fréquence de 3 heures. Un rapide calcul me disait qu'il devait être aux alentours des 9 heures et quelques.
La veille, j'avais pris le soin de situer parfaitement où se trouvait la "Cebu south bus station", d'où partaient les autocars pour Moalboal, à environ 900 m, de mon hôtel. Un kilomètre à pied, ne me faisant absolument pas peur, c'est à de bonnes enjambées que je me dirigeais vers l'artère principale, une jolie 8 voies au trafic inlassable. Depuis moins d'une semaine que je suis là, je commence à analyser l'aménagement des villes Philippines. On passe d'une facilité déconcertante, de ces autoroutes urbaines à ces minuscules ruelles qui entrelacées entre elles forment de magnifiques dédales, donnant de petits quartiers que l'on pourrait qualifier de pavillonnaire où il règne une certaine quiétude entre pot de fleurs, terrain de jeux, échoppes et coqs de combat. En dehors, c'est la jungle, l'empire des transports motorisés en tout genre : scooter, motos, tricycles, side-car, berlines, 4x4, pick up, camionnettes, camions, blindés de transport de fonds, minibus, autocars, ...
J'ai l'impression que tout l'arsenal des véhicules thermiques de la planète y est représenté.
Ma course, d'un pas très actif, fut, d'un seul coup d'un seul, stoppée net !
Un paramètre pourtant bien connu se produisit, auquel je devais réagir immédiatement ; pas le choix de faire autrement.
Arrêt net.
Je quittais mon sac à dos. J'avais mis en place une petite logistique astucieusement installée, déjà mise à l'épreuve au cours de différents autres voyages en Asie du sud-est et dont je suis particulièrement fière. Même si ce n'est pas très esthétique, cela est rudement pratique et efficace. Un petit truc de rien du tout, n'ayant aucune valeur marchande mais qui vous rend de fiers services, le jour J, à la minute même. En effet, à ce moment-là, où le phénomène se produit, sans prévenir, vous n'avez pas le temps de tergiverser longtemps. Il faut agir vite mais efficacement.
D'abord, vous quittez votre sac à dos. Puis vous rabattez le fameux sac plastique de 100 litres. Vous sortez un minuscule sac en plastique transparent de la petite poche intégrée à la ceinture abdominale de votre sac, grosse ceinture molletonnée qui reporte une grande partie du poids sur vos hanches afin de protéger la charge de vos épaules et de votre dos. J'estime la mienne à environ 8 kg, bien que pesée 7,5 kg au comptoir d'enregistrement du terminal 1 de l'aéroport Marseille Provence.
Eh oui, les affaires du voyage : polaire, veste, chaussures, chaussettes, etc y ont trouvé refuge, jusqu'au prochain vol en avion. Je ne déambule pas dans Cebu city sous une température approchant les 30 degrés comme vous qui êtes en train de me lire avec une température hivernale.
C'est ainsi, que j'effectue précisément et rapidement chaque geste. Je sors un vêtement tout en plastique de mon minuscule sac que j'enfile. Je reprends et ajuste mon sac à dos. Puis je repars d'un pas pressé. Je ne peux plus vous cacher que j'ai senti quelques gouttes d'H2o sur ma peau. Les pluies peuvent être intenses mais fort heureusement de courte durée. Me voici donc équipée de ma cape de pluie et mon sac est protégé par un immense sac poubelle.
Je n'ai donc pas perdu beaucoup de temps, tout au plus deux minutes.
N'ayant pas envie de rester à attendre au terminal de la station de bus, une heure, deux heures, voire trois heures, alors, je presse encore plus le pas. Je m'aperçois que la chaussée peut être glissante. J'assure donc mes foulées de façon précise afin d'éviter l'aquaplaning. J'aurais l'air bien maline étalée de tout mon long ...
Je sens que la station n'est plus très loin. Je me hardis à traverser entre les files de véhicules à l'arrêt.
Ouf, me voilà enfin de l'autre côté, les bus me tendent les bras. Je me précipite sur un gars en uniforme, qui particulièrement réactif me demande : "where do you go?".
"Moalboal", répondais-je !
Un grand sourire illumina mon visage. J'avais bien prononcé la destination, il avait compris de suite.
Il me dit de ressortir du parking où je m'étais engouffrée et de me rendre au bâtiment suivant afin d'acheter mon billet.
C'est, cela, le miracle de l'Asie.
La population est particulièrement avenante. Les personnes aident naturellement.
Se déplacer, en Asie du sud-est, est d'une facilité déconcertante. Lorsque je compare à mon propre pays, j'ai honte parfois d'être française, vis à vis des touristes que nous accueillons régulièrement sans le moindre égard.
Dès mon entrée dans le hall, j'aperçois trois guichets avec pour chacun d'entre eux une bonne file d'attente. Grosso modo, c'est noir de monde. Je commence à blêmir.
Je choisis, au jugé, la file du milieu et commence mon attente. Une dame âgée remonte la queue en s'excusant. Tout le monde la laisse faire. Puis, c'est le tour d'un autre homme, plutôt âgé, également. La préposée s'avère être très efficace, j'arrive, enfin, à acheter mon billet. Un peu moins de 300 pesos que j'évalue environ à 5 euros. Je quitte le comptoir sous les conseils d'un autre employé des autobus et me dirige vers la salle d'attente. Mais là, un autre type me prend en charge car honnêtement, je ne comprends rien du tout. Je suis bien incapable de me débrouiller toute seule. La seule et unique façon de s'en sortir et d'arriver à bon port est de faire entièrement confiance aux autochtones. Je le suis donc aveuglément comme un sauveur. Je grimpe dans le bus, déjà plus que rempli. Il me désigne l'unique place assise qui restait de libre. Je dois caser mon gros sac à dos en hauteur, ne me voyant pas faire quatre heures de voyage avec lui sur les genoux. Je me retrouve près de la fenêtre, assise à côté d'un charmant jeune homme que j'estime à 14 ans tout au plus, qui se lève pour me laisser accéder à mon fauteuil. Il ne se passe pas plus de 5 minutes que, déjà, le car se met en branle.
Cela y est, j'y suis, enfin, arrivée. La suite du voyage ne dépend plus de moi. Le bus roule vers Moalboal, ville balnéaire sur la côte ouest de l'île de Cebu dans l'archipel des Visayas à 800 km au sud de Manille.


J'écris ces premiers instants de voyage, à chaud, depuis ce bus brinquebalant, nous sommes le samedi 21 janvier 2023.